Alors là : voilà ce qui s’appelle une surprise ! Le troisième album de My Bloody Valentine …
Nous ne sommes pas le premier avril et ce n’est pas une mauvaise plaisanterie. Kevin Shields et sa bruyante bande ont pris toute la planète rock à contrepied, en publiant sur leur site il y a 5 jours « m b v », un nouvel album inespéré qui joue les serpents de mer depuis plus de vingt ans et qu’on s’était résigné à ne plus attendre.
Pourquoi est-ce un évènement majeur ? Parce que My Bloody Valentine est devenu un groupe culte, une référence mythique sur le plan artistique citée par de très nombreux groupes de ces 20 dernières années. Revenons à la fin des années 1980. En deux albums, Kevin Shields (guitare et chant) Colm Ó Cíosóig (drums) Bilinda Butcher (guitare et chant) et Debbie Googe (basse) vont bouleverser l’esprit même de la musique rock. Ils osent associer des mélodies belles et enfantines à un mur du son expérimental et bruitiste. Ce qui est évident et banal en 2013 ne l’était pas à l’époque : ils ont été les premiers, les éclaireurs, ceux qui sont allés le plus loin dans la découverte de nouveaux paysages sonores. Prenant le chemin tracé à l’époque par le shoegaze de Ride ou la noisypop de Wedding Present, ils partent tout seuls en dehors des sentiers battus et des charts pour expérimenter la recherche musicale par la distorsion, la dissonance, la reverb et les bruits blancs.
Le plus simple est de vous faire écouter des morceaux de l’époque. Par exemple « Sue is fine » sur le premier album « Isn’t anything », en novembre 1988, paru sur un autre mythe, le label Creation.
En dépit du caractère pointu et audacieux de leur musique, le succès est au rendez vous. Pitchfork par exemple, leur décerne la note maximale, rarement atteinte de 10/10. Ils sont premier dans les charts indie Anglais, et l’album est classé dans les 60 meilleures ventes d’album en Angleterre . Et il figure maintenant dans toutes les listes des meilleurs albums de tous les temps. Mais leur plus grand succès sera le deuxième album, « Loveless ». Sorti en décembre 1991, il figure dans quasiment tous les bilans des meilleurs disques de l’année. Et surtout il sera par la suite souvent désigné comme le disque majeur des années 1990, et apparait dans toutes les listes des meilleurs disques de tous les temps.
Un petite piqûre de rappel :
Voilà pour le rappel historique. Mais ça c’était avant. Il y a 21 ans. Depuis Kevin Shields a multiplié les annonces de parution d’un troisième album, toutes déçues les unes après les autres. Le groupe se sépare en 1995. Island qui les avait signés après « Loveless » se sépare d’eux en 2001. Et puis l’horizon se dégage avec une reformation pour des concerts en 2008 lors des grands festivals de l’été.
Jusqu’à ces derniers jours, où le groupe a surpris tout son monde avec la mise en ligne sur leur site de « m b v », un troisième album 9 titres, disponible en téléchargement, vinyl ou CD. Conséquence immédiate : le crash du serveur de leur site compte tenu de l’affluence …
Et donc le voilà ce troisième album de My Bloody Valentine! Que vaut-il ? Pas de problème : on les retrouve là où on les attendait, à savoir toujours noyés dans les expériences sonores, dans des tourbillons de boucles et de reverb, avec le chant halluciné de Kevin Shields. Par rapport à ses vieux prédecesseurs, c’est un disque beaucoup plus apaisé, calme, presque ambient. My Bloody Valentine ne cherche plus à jouer les gros bras et à prouver sa puissance de feu. Ce sont plutôt des ondes et des interférences en milieu aquatique qui nous font perdre pied dans une belle pop rêveuse et habitée. A l’image de « If I am » :
Et incroyable : il y a même un tube sur « m b v ». Ce n’est pas un morceau représentatif de l’ensemble de l’album, mais il est très réussi : « New you » .